Les dermatites auto-immunes (DAI) repr ésentent un ensemble complexe de dermatoses,ayant en commun l’existence de mécanismes d’auto-immunisation vis à vis des composants peau. Il s’agit d’entités rares, causes peu fréquentes de consultation en dermatologie des carnivores domestiques. Leur traitement fait appel à une immunomodulation, potentiellement dangereuse pour l’animal,qui doit toujours être mise en place de façon mesurée et raisonnée.
PRÉALABLES AVANT LA MISE EN PLACE D’UNE
CORTICOTHÉRAPIEPOURLETRAITEMENTD’UNEDAICHEZ LECHIEN
CERTAINES REGLES GÉNÉRALES DOIVENT ETRE SUIVIES :
En premier lieu,il faudra être sûr du diagnostic,ce qui implique une anamnèse et une clinique compatibles, l’élimination des autres hypothèses diagnostiques, et un diagnostic (histopathologique,voire immunologique) de certitude ou fortement évocateur.
En second lieu,le traitement doit être raisonné :il faudra recourir aux drogues les moins toxiques, préférer l’utilisation d’associations médicamenteuses,qui permettent parfois de réduire les effets secondaires à long terme,adapter le traitement en fonction des propriétaires (administration facile, coût...).
En plus du traitement médical,il sera toujours bon d’identifier et d’éviter si possible les causes aggravantes et/ou déclenchantes (DAI photosensibles ou d’origine médicamenteuse).
L’utilisation concomitante de shampooings est toujours intéressante pour réhydrater la peau et éliminer squames et croûtes.
Une récente étude nord-américaine suggère d’utiliser systématiquement une antibiothérapie au début du traitement immunosuppresseur. Cette association permettrait d’augmenter la survie des chiens atteints de pemphigus foliacé.
Il faut également s’assurer de la coopération du propriétaire,et l’impliquer dans la dermatose de son animal :des visites de suivi régulières sont indispensables.
UTILISATION DES CORTICO'iDES EN PRÉSENCE D’UNE DAI
Les glucocorticoïdes sont indiscutablement l’arme de choix en cas de DAI. En effet,ils présentent une action rapide,polyvalente et un coût relativement faible. Leur utilisation doit cependant être raisonnée,car ils peuvent provoquer des effets secondaires,d’autant plus que les doses nécessaires sont souvent importantes et administrées au long cours.
Leur mode d’action dans les DAI est complexe. Ils diminuent la synthèse d’auto-anticorps anormaux,la lymphoblastogenèse,la fonction des neutrophiles,la fabrication du complément et le dépôt des immun-complexes,par baisse de leur passage à travers l’endothélium vasculaire et la membrane basale. Aux posologie utilisées en pratique,leurs effets bénéfiques seraient plus liés à leur action anti-inflammatoire qu’à une réelle immunosuppression.
Les règles générales d’utilisation des glucocorticoïdes sont résumées dans le tableau I.
On utilisera des substances administrables per os,et qui peuvent être prescrites à jours alternés. La prednisolone et la méthylprednisolone sont les molécules de choix. Les doses d’induction varient : prednisolone (2 à 4 mg/kg/j), méthylprednisolone (1,6 à 3,2 mg/kg/j), dexaméthasone (0,25 à 0,75 mg/kg/j) ou triamcinolone (0,2 à 0,7 mg/kg/j). Les trois premières sont utilisables en jours alternés,les deux dernières ne le sont pas. Ces doses doivent être progressivement réduites dès le contrôle des lésions:on administrera le médicament un jour sur deux pendant une à deux semaines, puis on diminuera la dose de 30 à 50 pour cent tous les quinze jours. Le but est d’atteindre la dose la plus faible possible,administrée le moins souvent possible pour contrôler les signes dermatologiques.
Il faut également envisager le recours en association à d’autres immunomodulateurs, qui permettent au long cours une épargne corticoïde.
EXEMPLE D’UTILISATION : PROTOCOLE DE TRAITEMENT
DU PEMPHIGUS FOLIACÉ
Le pemphigus foliacé est,après
le lupus érythémateux, la DAI la plus fréquente chez le chien. Nous proposons dans la figure suivante une approche thérapeutique pratique de cette
dermatose.
REMARQUES
La voie parentérale est de peu d’utilité car peu précise,avec des effets variables dans le temps. En outre, les effets secondaires apparaissent
rapidement dans ces maladies chroniques nécessitant
un traitement prolongé.
La corticothérapie pulsée,qui consiste à administrer de fortes doses de corticoïdes par voie intraveineuse pendant de courtes périodes, a été peu étudiée en médecine vétérinaire. Chez l’homme,il ne semble pas qu’elle permette des résultats statistiquement plus
intéressants que les protocoles classiques. L’utilisation des dermocorticoïdes doit toujours être envisagée, surtout pour les formes localisées (exemple : lupus cutané, pemphigus érythémateux), mais également pour les formes généralisées, si l’animal est docile. Une récente étude chez l’homme a en effet montré que l’application de dermocorticoïdes de classe I sur les lésions bulleuses de pemphigoïde bulleuse était aussi efficace, aussi rapidement, mais présentait beaucoup moins d’effets secondaires au long cours que la corticothérapie par voie générale.
CONCLUSION : SUIVI DU PATIENT
Pour ces dermatites nécessitant une immunomodulation au long cours, des visites de réévaluation fréquentes sont indispensables. Lors de ces visites,le clinicien devra vérifier l’état cutané, et également s’attacher à dépister un début d’intolérance au traitement (bactériurie, polyuropolydipsie,polyphagie,glycémie,…).
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