L'odeur, la saveur et la couleur du lait subissent parfois l'influence spécifique de certaines plantes ou plus souvent les conséquences de la mauvaise conservation de tout aliment.
• ALTÉRATIONS ORGANOLEPTIQUES PROVOQUÉES PAR DES PLANTES
Diverses plantes, plus ou moins connues pour leurs propriétés odoriférantes, gustatives ou colorantes, peuvent les transmettre au lait.
Les résultats favorables restent rares. même si on admet par exemple que la luzerne lupuline augmente le goût de noisette du beurre et que différentes flores de régions privilégiées, de montagne notamment, seraient susceptibles de communiquer "un goût de terroir".
Plus souvent, on cite des effets défavorables des plantes suivantes :
• Les crucifères tels que les choux, le colza, la navette, le navet, le chou-navet, la moutarde, la ravenelle, le thlaspi, confèrent quelquefois au lait une odeur piquante et un goût àcre, en raison de la présence d'hétéro-sides sulfurés ou "sénévols".
• Différentes légumineuses, comme la luzerne, le trèfle, les pois, les vesces, les gesses, les féveroles, le lotier corniculé, l'anthyllis, les lupins, contiennent des substances amères, vraisemblablement des saponines, qui se retrouvent en partie dans le lait.
• Le tournesol-fourrage, récolté trop tardivement, c'est-à-dire après la
formation des graines, donne au lait une odeur et un goût de résine.
• Les betteraves, leurs feuilles et collets, la mélasse et les vinasses, ainsi que les ensilages de blé en herbe, renferment de fortes proportions de bétai'nes, que la flore rumi-nale peut convertir en triméthyla-mines, responsables d'une flaveur de poisson dans le lait.
• L'ail sauvage, l'alliaire, les poireaux, les oignons, l'anis, le thym, le fenu-grec, la gentiane, la camomille, la mercuriale, l'armoise... peuvent conférer au lait une flaveur désagréable qui leur est caractéristique.
• La renoncule àcre, le cresson sau-vage transmettraient une odeur féca-loi'de.
• La mercuriale, le mélilot et le tourteau d'oeillette ajouteraient une nuance bleutée, alors que les prêles, le gaillet et les jeunes pousses de conifères induiraient une couleur rosée.
• ALTÉRATIONS ORGANOLEPTIQUES PROVOQUÉES PAR DES ALIMENTS MAL CONSERVÉS
Les aliments mal conservés sont, sans doute, moins variés ; mais, en élevage intensif, ils présentent davantage de risques que les plantes précédentes.
• Ensilages de mauvaise qualité
Les ensilages de mauvaise qualité sont les principaux vecteurs de fla-veurs désagréables dans les produits laitiers.
Ils comportent notamment de l'ammoniac et des amines qui ris-quent de transmettre leur odeur putride, alors que l'acide butyrique est normalement sans effet puisqu'il est catabolisé dans l'organisme.
En plus, apparaissent des substances aromatiques plus spécifiques des ensilages : les unes sont agréables, mais l'acé-tone 2 butanone apporte une forte "odeur de vache" et les dimétbylsul- fures sont à l'origine d'odeurs très désagréables "d'ensilage" ou "d'eau sale" ou "d'huile", qui se concentrent dans les beurres.
Le transfert de ces odeurs au lait ne se réalise qu'en partie par voie diges-tive à la suite de l'ingestion de ces ensilages. Il débute alors une demi-heure après celle-ci ; il est maximum en 2 h et disparaît à peu près totalement en 4 h. Il s'effectue également par inhalation à partir de l'odeur de l'étable ou à l'occasion des éructations ; il est alors plus rapide et atteint son niveau le plus élevé en 15 à 30 minutes seulement.
La prévention consiste à mettre en oeuvre les recommandations suivantes :
- n'utiliser, chez les vaches laitières, que des ensilages d'excellente qualité, préparés en respectant bien les règles classiques (récolte au stade optimum de matière sèche, hachage fin, tassement efficace, adjonction éventuelle d'un agent de conservation tel que l'acide formique ou des germes lactiques, fermeture hermétique du silo, consommation rapide après ouverture de celui-ci) ;
- distribuer cet ensilage au moins 4 heures avant la traite ou, mieux encore, juste après cette dernière ;
- ventiler l'étable et nettoyer les auges avant la traite ;
- ne pas exposer le lait trait à l'odeur de l'étable ou même du silo (le transporter de préférence sous canalisation dans un réservoir clos).
• Autres aliments altérés
Les autres aliments altérés peuvent l'avoir été par le développement de moisissures dont l'odeur peut parvenir dans le lait.
Ce sont aussi les aliments qui contiennent des graisses oxydées conférant leur odeur de rance ou de poisson au lait et au beurre.
Le risque est encouru avec les céréales fermentées ou vieillies, en particulier avec le maïs et l'avoine qui sont les plus riches en lipides et spécialement avec des farines préparées trop longtemps à l'avance. Il survient également avec des sons ou des tourteaux expellers rancis ; il serait plus accentué encore si on utilisait de mauvaises farines de viande ou de poisson ou des huiles oxydées, qui ajoutent l'odeur de triméthylamines.
Il importe donc de ne recourir qu'à des aliments frais, bien conservés, suffisamment délipidés ou protégés par l'adjonction d'antioxydants.
Toutefois, il faut noter que toute altération de la flaveur du lait ne doit pas être rapportée systématiquement à l'alimentation.
En effet, le lait fixe facilement dans ses graisses des odeurs et saveurs aberrantes qui sont fréquemment liposolubles.
Au cours de l'entreposage, il peut, par exemple, prendre les odeurs nauséabondes des étables malpropres et mal ventilées ou les odeurs plus aromatiques des salles de réfrigération.
En outre, les traitements industriels sont susceptibles d'additionner un "goût de cuit" ou même "de brûlé".